vendredi 26 mars 2010

Tempête de neige 22 mars

Deux jours plus tôt, à Québec, on fêtait trois semaines de beau temps quasi parfait.



Mais la neige n'avait pas dit son dernier mot.


dimanche 21 mars 2010

Art Gallery of Ontario

Populeux, sonore, moderne, tout à l’image en fait de celui du Louvre, le hall de l’Art Gallery of Ontario, le plus grand musée de Toronto avec le Royal Ontario Museum, permet de retrouver jusqu’à cette impression tout-à-fait troublante de pénétrer un grand parc d’attractions. Difficile de ne pas lire sur les visages la pénible soumission au devoir culturel, jamais trop compris, et dont le corollaire est l’ennui plus souvent que le plaisir ; ou alors l’anxiété de ne pas savoir à quoi s’attendre, du risque de ne pas trouver la révélation qu’on attend, de ne pas être sensible – sensible bien comme il faut, chez le snob, mais aussi sensible pour de vrai, consentant, une peur qui a peut-être une parenté avec celle de ne pas jouir, mais je m’égare.


Deux découvertes fortes.
Rodin, d’abord, que je n’avais jamais appréhendé vraiment. La Gallery en possède notamment une petite Eve en pierre blanche* et un Adam gigantesque, en bronze je crois. C’est l’Eve tout particulièrement qui m’a fasciné : la pierre est si pure qu’on la croirait faite dans un nuage, et dans mon souvenir la lumière qu’elle renvoie la nimbe très légèrement ; seule, à la cuisse, une petite veine bleu ou noire empêche de parler d’une vision éthérée. Eve est figée à l’instant de la honte, son visage n’est pas enfouit dans la pi
erre de son bras mais il est impossible à l’œil spectateur d’y avoir accès. Mais il y a aussi une grande sensualité, à cause de la main qui passe dans les cheveux, des bras qui dissimulent les seins en les embrassant, et de la texture de cette pierre qui semble si douce, d’où un certain malaise moral, peut-être, une contemplation comme mise en porte-à-faux avec elle-même.

He
nry Moore, le lendemain, que je ne connaissais pas du tout. Ce n’est pas venu tout de suite, ces grandes sculptures massives m’ont d’abord parues tout-à-fait hermétique. Et puis, l’une d’entre elles s’est ouverte, je ne sais plus laquelle mais c’était une femme allongée sur le côté. On touchait à quelque chose de très lointain, comme à une note fondamentale de la représentation de la femme dans toutes les cultures occidentales depuis le fin fond de l’antiquité. Cette note à fait éclore plusieurs autres sculptures après, mais pas toutes. Oh, je vois que je n’ai rien à dire qui ne soit qu’imagination, alors je me contenterais de vous inviter, si un jour l’occasion se présente, à prendre le temps d’apprécier Moore. « Il y a quelque chose. »


Une sculpture d'Henry Moore devant l'hôtel de ville de Toronto.

Tandis que je marchais entre les sculptures, le gardien de la salle s’est approché dans l’intention de discuter avec moi. J’ai regretté de ne pas savoir assez l’anglais pour ne pas rompre un possible, celui d’un beau moment peut-être.

* Il semble en fait que l'œuvre définitive soit en bronze.

dimanche 14 mars 2010

Toronto


Le long du lac Ontario est une succession serrée de petits quais, de ponts en vagues, de promenades en bois et de parcs simples : c’est le waterfront, d’une solitude exquise à la lueur du matin, et qu’il faut goûter comme ça.

Lueur, lumière rase, et douce à la peau, qui dore les pelouses laissées mortes par les neiges évacuées, et qui se noie après dans le ciel vide et le lac, qui le redit.
Cette simplicité vaste de la palette, j’en retrouvais les reflets dans toute la ville, à moins que ce ne fût, justement, le charme éthéré d’un limpide début de mars.


J’ai posé ma paume et mes doigts nus sur le béton vierge et rugueux de l’un des bâtiments les plus hauts du monde, le second pour être exact, et le premier il n’y a pas trois ans.

L’un des plus hauts, et l’un des plus inutiles aussi : la CN tower n’est pas beaucoup plus que ce qu’on imagine, soit une antenne sur laquelle s’est empalée un restaurant. Je l’aime bien cependant, ce long doigt tendu comme un défi – aux gens qui sont de l’autre côté du lac ?


Il y a un moment où il faut s’arrêter de marcher, bien qu’il y ait encore du chemin jusque derrière l’horizon, et alors on se dit qu’on n’ira jamais plus loin dans cette direction. Toronto était probablement le point le plus à l’ouest de mon séjour en Amérique du nord, et je conserve ici la mémoire d’un point géographique que je ne dépasserai pas avant longtemps, peut-être même jamais. C’était du côté de High Park, sur une petite plage de sable froid.

Il ne me manque plus que trois photos.


Je préfère les quartiers périphériques aux buildings à la mode du cœur de Toronto, mais c’est aussi par le contraste qu’il font avec le quartier des affaires, donc il n’y a pas rejet.

Contraste, car couleurs sombres, allures d’abandon et de négligence des pavillons de bois, couleurs crues et bric-à-bracs des commerces de briques. Dans les jardins rendus sauvages par la neige disparu, des vieux jouets ça et là, et quelques détritus, attisent un sentiment de pauvreté, et dans le ciel les fils électriques s’entremêlent au réseau compliqué des câbles du tramway.

Toujours au-dessus des toits, le profil aigü de la tour CN.

jeudi 4 mars 2010

Mars

Avec le premier jour du mois sont arrivés, tous dans le même bateau : un grand soleil, de l’air doux, un ciel limpide. La neige recule lentement à partir des bordures, comme le sang qui reflue vers le cœur quand on a froid. Elle découvre des pelouses mortes et de la terre vierge ; des chemins apparaissent qu’on avait oublié. Les flaques d’eau s’approfondissent doucement. Les écureuils se font moins discrets, et tout fleure bon le printemps, même si les arbres restent obstinément noirs. Prudence est de mise, pourtant, car Mars belliqueux est un mois de tempêtes.